Pour la voir à l'endroit, c'est par là!
Caroline Delcourt, jeune comédienne fraîche émoulue de l'école Claude Mathieu à Paris.
Pour la voir à l'endroit, c'est par là!
0 Commentaires
A quelques exceptions près, et par un étrange phénomène boule-de-neige, je ne photographie que des comédiennes brunes. Maxime est un mannequin (en herbe) blond. Je profite donc de cette minute exotique pour déclarer aux hommes, aux blonds et aux non-comédiens que je peux aussi les photographier, preuve en est.
Au demeurant, je remarque avec Maxime un autre étrange phénomène, qui n'a pas tant à voir avec la photogénie, au sens large, qu'avec cette étanchéité qui rend certaines personnes plus photographiables que d'autres. Je trouve extrêmement difficile de poser : quand il m'arrive d'être face à un objectif, j'ai l'impression que mes yeux fondent, que mon visage se disloque et que mon front devient carré. L'appareil efface complètement la personne qui le tient, et la situation glisse dans un abîme d'absurdité. Parfois, les modèles s'installent devant moi et je les vois plonger dans cette dislocation désagréable - il faut alors beaucoup parler pour que l'appareil pèse moins dans son impudence technologique, arrête de découper le visage en morceaux, et que la personne se rassemble (au lieu de se ressembler dans un effort douloureux). Or certaines personnes, dont Maxime, résistent d'emblée à la dislocation, avec une aisance qui me laisse admirative et perplexe. Leurs yeux restent en place, aucune panique ne brouillent leurs traits, ils restent retranchés en eux-mêmes, tout à fait présents mais un peu lointains, dans une distance qui les protège. C'est très agréable de les photographier, on n'a jamais l'impression de leur voler quelque chose. Concernant Maxime, cette photo n'est pas la meilleure de la série, mais c'est la première (et la première fois qu'il pose). En général la première photo est loupée : elle introduit la prise de vue - on cherche, disons, un plan commun. Certaines personnes comme ça arrivent, s'installent, et ont exactement le regard, le sourire, la présence qui conviennent pour démarrer, et l'intendance suit (la lumière, l'angle, l'échelle, tout le bazar technique). Il n'y a qu'à les suivre. C'est fascinant. Le mini-book de Maxime, à voir là Clémence Larsimon, comédienne et prof de théâtre, hier à Paris. D'autres photos de Clémence (petite série sur FB), par là
Claire Duchêne. Il paraît que ces photos-là, dans les books, c'est le mal (on peut cliquer dessus pour l'agrandir). Trop "artistique", trop travaillé, trop ceci et pas assez cela. A en croire les directeurs de castings et agents, le nec plus ultra de la photo de book serait finalement le photomaton (ce qui, heureusement pour les photographes, ne se vérifie pas tout à fait). Certes, cette photo est plus travaillée que les autres, et puis elle est prise à travers une vitre. Mais elle dit bien, me semble-t-il, la personnalité du modèle, à la fois douce, discrète, et très franche, frontale - avec ces yeux dont le vert intense semble avoir envahi toute l'image. Donc pourquoi pas dans un book, censé exprimer la présence particulière d'un comédien, son potentiel personnage?...
D'autres photos de Claire, par ici (mini-book sur FB). Claire Duchêne, samedi à Paris. Claire est comédienne, elle termine juste sa formation à l'Ecole du Jeu (Delphine Eliet), et fait partie de la troupe des EduLchorés, dirigée par Emma Pasquer. Après une série de photos très jeune-fille-en-fleur, nous sommes parties dans la rue pour quelques images plus urbaines. Ici, nous sommes de part et d'autre de la chaussée, et je dois photographier vite entre deux voitures, ce qui fait sourire Claire. Claire sourit à une voiture qui s'amène, à un oiseau qui passe, à l'objectif, aux blagues improvisées d'un enfant blond. Son sourire irradie et je suis obligée de lui dire d'avoir l'air moins joyeuse, parce que son book doit aussi montrer d'autres visages, des tristes, des préoccupés, des tragiques. Ce dont elle s'acquitte avec grâce et précision.
Les photos vont faire le tour du monde, parce que Claire part cette automne conquérir l'Australie. Quand d'autres pensent New-York, Broadway, Hollywood, elle rêve de Sidney et d'aventures théâtrales aux confins du monde anglo-saxon... fascinée depuis longtemps par ce continent encore sauvage, où les alligators se baladent en liberté et où on peut mourir desséché dans le désert en trente minutes. Mais surtout, où tout est possible, encore. Des rêves longtemps mûris font briller ses beaux yeux verts, et sa joie est contagieuse. Bon vent Claire, et bonne chance! |
Avril Dunoyer |