J'aime beaucoup cette photo de Tiphaine, simple et frontale, avec son visage d'automne. Du rouge, du roux, du rose, du brun, et ces grands yeux dont le vert tire sur le noisette. Je n'ai pas fait grand-chose, simplement renforcé un peu les rouges pour souligner la nuance fauve de ses cheveux. Tiphaine a des taches de rousseur, délicate pluie sur le nez et les pommettes qui implique de laisser la photo la plus brute possible, si on veut les préserver au fil des traitements. Elle est arrivée impeccablement maquillée, ce qui me permet de travailler dans la finesse, sans toucher à la carnation. 

Bien entendu, ça ne m'empêche pas de jouer plus tard avec mes teintes préférées, qui tirent sur le bleu, le blanc, le glacial, faisant ressortir des rouges et des noirs profonds. Les jolies taches de rousseur disparaissent en cours de route... C'est la Tiphaine d'hiver. 

Cet effet voilé, poudré, légèrement David-Hamiltonien sur les bords, n'est pas facile à créer. Il faut un contrejour franc, avec un rayon de soleil direct derrière le modèle, et une légère surexposition. Une fois que c'est attrapé, on ne peut plus rien toucher... La moindre modification de balance, d'exposition, ou toute tentative de retouche crée un contraste qui défait cette brume, l'atmosphère à la fois aérienne et épaisse visible entre le modèle et l'objectif. Une photo brute, donc.

A part ça, Garance est comédienne, elle a vingt ans. Elle est belle, drôle et vive. C'est très agréable de se balader avec elle. Quand on shoote dans la rue, les gens nous sourient, nous parlent gentiment, une voiture s'arrête pour me laisser la photographier du milieu de la chaussée. Je ne sais pas ce qu'en penserait Paul Nizan, mais ça a l'air plutôt pas mal, d'être une Garance comédienne de vingt ans...